
Le mot de ...
Anne Sixdeniers
Membre d’honneur
et co-fondatrice de Toutes en Moto
Et si…?
Et si… nous faisions une sortie moto pour célébrer la journée des droits des femmes ?
Et si… nous demandions à nos copines de se joindre à nous ?
Et si… nous demandions à d’autres femmes de se joindre à nous ?
Nous étions deux femmes, membres du même club moto, dans lequel il y avait plusieurs femmes pilotes comme nous deux. Nous étions en Janvier 2010, et au cours d’une réunion amicale, discutant des sorties de l’année à venir, l’idée a germé d’organiser une balade moto entre filles, à l’occasion du 8 mars, pour affirmer notre féminité, notre féminisme et célébrer, à notre façon, cette journée dédiée aux femmes.
De fil en aiguille, notre projet est devenu plus ambitieux : réunir toutes les femmes motardes de la Capitale et défiler à travers Paris ! "Toutes En Moto" était née.
En à peine deux mois, avec le soutien et les conseils de la FFMC PPC, nous avons appris comment organiser un défilé : demander les autorisations (ah bon, on ne peut pas faire comme on veut ?), trouver le parcours (ah oui, on ne peut passer n’importe où), prendre une assurance (ça aussi c’est obligatoire ?), communiquer (euh, les affiches, on fait comment ? on cible qui ?).
A deux, avec de bons soutiens, de bons conseils, nous y sommes parvenues.
De nombreux bénévoles ont contribué à la réussite de notre premier défilé, le 7 mars 2010 : 250 motos et 400 participants ont traversé Paris, depuis l’Esplanade du Château de Vincennes jusqu’au Trocadéro.
Et après ce premier défilé, on fait quoi ? Eh bien on en prépare un autre pour l’année prochaine ! Et surtout on n’oublie pas que l’ADN de "Toutes En Moto" reste la défense des droits des femmes !
En 2011, Chantal Leca nous rejoint et organise un défilé à Marseille. Le succès se confirme : "Toutes En Moto" devient un événement national majeur de la moto au féminin en mobilisant à Paris 600 motos et plus d'un millier de personnes, à Marseille 500 motos et 700 personnes.
En 2012, deux nouvelles villes rejoignent le mouvement : Lille et Nantes !
Depuis, chaque année le succès se confirme. De nouvelles villes s’ouvrent, d’autres se ferment, ainsi va la vie d’une association.
Deux reproches nous sont régulièrement adressés :
Le premier concerne le nom de notre association.
Il est vrai qu'en français, on ne dit pas en moto....plutôt à.
Mais comment expliquer à ces académiciens en herbe, qui se sont découvert subitement une passion pour la langue française, à défaut d'une passion pour l'égalité des sexes, qu'être en moto évoque pour nous souvent bien plus qu'un simple moyen de transport, qu'il s'agit d'être en mouvement, certes, mais aussi en harmonie, en joie, en beauté, en femmes de son temps, en liberté, totale, parfois en colère, mais toujours en accord avec soi-même , en...tièrement!
Conduire une moto aujourd'hui pour une femme, cela va de pair avec une certaine façon de vivre, de penser et d'agir. Et ce sont ces femmes, un peu particulières, un peu hors normes, singulières qui choisissent de s'affirmer ainsi, en refusant de se laisser conduire, en prenant les choses en mains, à leur façon toute aussi singulière...en force ? Non, mais avec autant de douceur que de détermination et...indiscutablement.
Le second concerne la présence et la place des hommes dans nos défilés.
Il va de soi que les messieurs sont les bienvenus, car pour faire évoluer la société, réduire les inégalités salariales, permettre aux femmes une meilleure représentation en politique, ou encore partager les tâches ménagères de façon à permettre à leurs compagnes de concilier réussite professionnelle et épanouissement personnel, nous avons besoin d’eux et c'est ensemble que nous y parviendrons.
Certains nous taxent de féministes, avec en tête des sous-entendus réducteurs, mais célébrer la journée de la femme c'est afficher nos convictions féminines et expliquer que le féminisme ce n'est pas aider ses consœurs, mais se battre à armes égales avec les hommes, offrir aux femmes des choix, pas des garanties : la moto n'est-elle pas la meilleure traduction de ce message ?
Je suis fière de ce que l’association est devenue et je salue ici l’engagement de toutes les bénévoles qui se sont engagées à mes côtés.
Conduisons nos vies !